Lyonnais, « propriété » de Nico Poisson qui gère aussi S.K Records (entre autres), Sathönay saze à souhait, développe de longues pièces hypnotico-fougeuses et sort avec ce Addio al passato son troisième album, après avoir connu différentes configurations. A quatre désormais (ah tiens, François Virot est de la partie! Good news!), les Rhodaniens ont capté ce disque dans l’isolement Vercorisé, allant jusqu’à nous concocter six morceaux étirés où le violoncelle de Léonore Grollemund, lui aussi, concourt à le décaler. C’est alors parti, Une Ligne Droite est justement sinueux malgré ce que son intitulé tend à faire croire. Il voyage, gronde, dépayse, se tribalise. Son chant flotte, incante. Son rythme, idem. L’imaginaire est stimulé, on pressent au bout d’une longue montée, la fissure. Mais non. Le discours s’écorche toutefois, on reste sur le fil du ravin et si la chanson prend vie, ou plutôt s’enfougue, c’est dans une forme de retenue. Intense, et bouillonnante. Electrique, il se tord et sert des sons qui couinent, magiquement. Dès le début Sathönay, dans l’identité, se place au devant. Long Long Walks est griffu, appuyé, tout aussi plaisant -et le mot est faible- que la composition d’ouverture. Le quatuor grince, sent le Turc quand le saz domine mais demeure avant toute chose Sathönay. Lyonnais, mais un peu d’ailleurs aussi.
Plus loin Find Another Use For It, dans un bricolage de début à la Tom Waits, dégage une belle pureté. Une force d’évocation, aussi, conséquente. Moins mordant, Sathönay présente là une autre facette de son riche répertoire. Le morceau, en sa moitié, s’emballe rythmiquement. Nous aussi, enfin en termes d’adhésion. Le Tour Du Jardin, de ses jolies notes, souligne tout à la fois l’éclat du rendu et l’apport du saz. Mélodique, singulier dans le mot, il n’a que faire de nos réticences. Difficile à décrire, difficile à écrire donc, le projet se saisit d’abord par une écoute poussée. Là encore, le titre breake et ensuite, impulse une autre direction sans porter atteinte à la valeur du résultat. Un tantinet psyché, dans la répétition de ses motifs. Et finalement, embarqué dans une belle embardée. Zébrée, lézardée.
On aime « grave », nul ne peut le contester. Extinction Of Extinction se charge alors d’entériner notre approbation, à grand renfort de parties de saz. Et pas seulement car de bout en bout c’est l’unisson de Sathönay, décisif, qu’il importe de noter. Au terme de l’opus High Flame, subtil, valsant, reproduit pour une dernière fois la magie enflammée, la capacité à évader l’auditoire via des sentiers Sathönay -parfois satinés- sans égal directement nommable. Lesquels, en dépit de leur durée fréquemment poussée, maintiennent une attention optimisée par leurs contours inédits.