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hippie diktat | gran sasso @ can this even be called music

France’s doom-jazz trio Hippie Diktat already made an impression on me with their previous album, Black Peplum, but it’s with Gran Sasso that I introduce them to you here. Not unlike bands such as Mombu and Mosca violenta, which collaborated on the amazing album Hunting Demons, Hippie Diktat’s music is slow, heavy, and atmospheric. Call it post-metal or instrumental doom, or yet again doom jazz—they all convey part of the message—Gran Sasso is a work quite similar to Ex Eye, featuring Colin Stetson, albeit much slower and oppressive.

DÆV TREMBLAY

hippie diktat | gran sasso @ indie rock mag

Troisième album du groupe, Gran Sasso ramasse toute l’exubérance du trio dans deux longs tunnels contemplatifs où la noirceur et l’angoisse se partagent l’espace. Après un Black Peplum qui avait réduit l’expression de leur post-jazz core à 4 titres denses et labyrinthiques, ce nouvel album déroule ses ambiances dans un langage plus resserré pour mieux faire progresser l’auditeur dans un brouillard de plus en plus épais et explosif. Par ces deux faces monochromes, Hippie Diktat rappelle non seulement le drone metal d’un Sunn O))), mais aussi les voyages vibrants et agités de Godspeed You ! Black Emperor.

La volonté de faire masse, comme cet abrupt monticule rocheux qui orne la pochette, est au cœur de ce disque. Pour produire cet effet de bloc de granit, les instruments s’interpénètrent, se confondent, se fondent les uns dans les autres. Le grain du saxophone, texturé par les effets, rend ou le son lourd et éraillé d’une basse électrique distordue, ou, comme sur le « solo » de la face A, qui émerge à la 10e minute, le grincement strident d’un violoncelle. Il se prolonge avec le drone d’une guitare jouée à l’archet. La batterie, sans interruption, bat le rythme binaire et nécessaire d’un cœur essoufflé. On passe de l’état méditatif et inquiet de la première moitié du titre à un marathon asthmatique, en passant par le réveil brutal qui suit un cauchemar terrible. Hippie Diktat, c’est un train obstiné sur une montagne russe sonore qui te prend et ne te lâche qu’après t’avoir fait passer à la moulinette de ses troubles obsessifs.

hippie diktat @ citizen jazz

Contrairement à ce qu’on pourrait croire, Hippie Diktat n’est pas le titre du dernier éditorial de Valeurs Actuelles au sujet des vélos en libre service ou de l’invasion de nos villes par les supérettes bio. Certes, on pourrait filer la métaphore en rapprochant la dureté acrimonieuse du saxophone baryton d’Antoine Viard, aperçu dans le quartet Pipeline, du ton bilieux de la guitare de Richard Comte avec les plumes de l’hebdomadaire, mais la comparaison s’arrêterait là ; il y a fort à parier que cette musique improvisée hérissée de métal ne sera jamais la bande-son des bouclages du magazine.

Sorti en coproduction entre le label Coax et les nouveaux venus de BeCoq Records, Black Peplum est le premier album d’un power trio qui a su se faire une place au cœur de cette scène en pleine effervescence, qui aime à marier la virulence du hardcore et l’immédiateté de l’improvisation. La sixième production de BeCoq confirme sa tendance à se situer au confluent des marges, là où se croisent le free, la noise et, donc, le hardcore, trois étiquettes que Hippie Diktat peut faire revendiquer. Une réputation précède le trio, ponctuée, voire assenée, dès « Black Peplum » par le batteur Julien Chamla, par ailleurs membre du quartet We are All Americans de Hasse Poulsen : celle d’un groupe cogneur et sans compromission. Elle se voit confirmer par la densité de l’album, où le baryton de Viard vient doubler la guitare sur la crête des cymbales.

Dans le maelström de « Deaf Can Dance », les hurlements de ce baryton peuvent faire songer à Eric Vagnon (Spoo), comme la sécheresse de la guitare trouve une proximité naturelle avec Kouma, autre trio du collectif Coax. Mais passée la décharge d’électricité, on découvre une certaine finesse derrière le mur de son, une masse extrêmement ouvragée malgré son aspect brut. C’est dans « Angoisse » que tout ceci se révèle, à mesure que l’impression de bruit blanc de la saturation se prolonge dans une sorte de continuum lancinant et mystérieux. Comme le paon aux centaines d’yeux qui orne sa pochette, Hippie Diktat sait transformer ses rodomontades agressives en parade colorée. Prenez garde tout de même aux coups de bec…

Franpi Barriaux

hippie diktat @ monsieur délire

HIPPIE DIKTAT / Black Peplum (BeCoq/Coax)

Ce disque est une collaboration entre deux jeunes étiquettes françaises qui me font flipper fort. Hippie Diktat est un power trio saxo baryton/guitare/batterie qui mélange skronk, rock psychédélique et doom. L’album est court (31 minutes) mais puissant à l’os et très convaincant. Ça me fait penser à Guapo, à Kruzenshtern i Parohod et à Seven That Spells, tout en même temps. Antoine Viard est monstrueux au saxo. Recommandé. 

This record is a collaboration between two young French labels that regularly get me all excited. Hippie Diktat is a power trio with baritone sax, guitar and drums. They blend skronk, psychedelic rock, and doom. Their album is short (31 minutes) but it packs a serious, convincing punch. I’m thinking of Guapo, Kruzenshtern i Parohod, and Seven That Spells all rolled into one. Antoine Viard is a monster on baritone sax. Recommended. 

hippie diktat @ pertes & fracas

Hippie Diktat

Black Peplum – CD

Coax records / BeCoq records 2014

Ah putain, comme ça a été dur pour m’en remettre. Mais alors là vraiment. Je ne parle pas de mes vacances d’été prolongées, sous le soleil caniculaire du Jura – et donc de mon absence totale de volonté pour reprendre l’écriture de chroniques de disques que personne ne lit – mais de ce concert, il y a un peu plus d’une année, où je découvrais enfin ce groupe précédé d’une réputation plutôt flatteuse : Hippie Diktat. Ne vous fiez surtout pas à ce nom, parce qu’Hippie Diktat n’est pas du genre à jouer une musique compatible avec les cours de sophrologie de votre maman ou les omelettes aux champignons hallucinogènes que votre papa se plait à cuisiner à chaque automne. Pas plus que l’oiseau ornant la pochette de ce disque ne donnera une indication fiable quant au réel contenu de Black Peplum, nouvel album de Hippie Diktat. Car comme l’affirmait ce cher Guillaume (Apollinaire), il n’existe peut-être pas d’animal plus ridicule et plus décevant que le paon : « En faisant la roue, cet oiseau / Dont le pennage traîne à terre / Apparaît encore plus beau / Mais se découvre le derrière. » Bon, rassurez-vous : je vais tout de suite arrêter de faire le malin et je ne vais pas vous causer poésie tout du long, parce que ce groupe mérite bien mieux que d’être comparé à un volatile orgueilleux.

Hippie Diktat est donc un trio. Un trio avec un saxophoniste qui pratique le baryton trapu, un guitariste sculpteur de saturation et un batteur opiniâtre. Et Hippie Diktat joue fort. Hippie Diktat joue gras. Hippie Diktat joue épais. Hippie Diktat est expert dans l’art de transmuter le jazz cher aux hippies et aux intellos de gauche pour le recomposer en quelque chose qui ne ressemble pas à une grosse merde progressive ou à une suite d’épanchements virtuoses. Et s’il y a du jazz ici, il n’est pas réellement free non plus, servant avant tout de référentiel mélodique voire lyrique – les complaintes du saxophone sur Full HD me donnent sans cesse la chair de poule – pour mieux préparer le déluge de feu qui pointe juste derrière et va bientôt nous exploser à la gueule. Plus organique et plus adipeux (qui a dit metal ?) que leurs collègues de Kouma, les trois garçons de Hippie Diktat partagent cependant avec les lyonnais ce volontarisme décomplexé et visionnaire qui, à nouveau, démontre infailliblement que l’on peut être un musicien qui a été à l’école et aimer quand même et malgré tout faire du bruit signifiant, tout ça sans passer pour un poseur ou un prétentieux (que les baba-zoukeurs fans de happy-math-noise lèvent la main et quittent la salle immédiatement).

Deuxième album de Hippie Diktat, Black Peplum est ainsi largement plus à la hauteur de ce concert d’il y a un an, reléguant au rang de souvenir un premier disque autoproduit méritant mais encore trop imprégné du jazz à papa, certes plein de bonnes idées mais à la personnalité pas encore suffisamment affirmée. Là on sent bien que le groupe est sur la bonne voie, qu’il a trouvé quelque chose et qu’avec Black Peplum il est habité par une énorme envie d’en découdre et de nous surprendre. Me vient immédiatement à l’esprit cet autre extrait (mon préféré à dire vrai) du Bestiaire de Guillaume Apollinaire et qui à mon sens colle bien mieux à la vindicte rageuse, intransigeante, électrique et parfois inquiétante de Hippie Diktat, cela s’appelle Le Poulpe : « Jetant son encre vers les cieux / Suçant le sang de ce qu’il aime / Et le trouvant délicieux / Ce monstre inhumain, c’est moi-même. » Merde, j’ai encore trouvé le moyen de parler poésie, quel sale intello je fais.

Hazam (10/09/2014)

hippie diktat @ heavy mental

Par contre ça va nettement moins rigoler avec HIPPIE DIKTAT (oui, c’est soirée spéciale noms de groupes à la con). Un trio dans lequel on retrouve le guitariste Richard Comte, auteur d’un album solo dont on reparlera très bientôt et déjà vu en concert avec Heretic Chaos, duo qu’il formait avec Yann Joussein de DDJ, SnAP, etc… Est-ce-que tout le monde arrive à suivre ? Non ? Bon, Hippie Diktat est, après SnAP découvert le jour d’avant, un autre groupe du collectif Coax, coopérative musicale décidemment en pleine ébullition. Au côté du guitariste jouent également un saxophoniste baryton (Antoine Viard) et un batteur (Julien Chamla).

Quoi ? Vous vous en foutez un peu beaucoup des noms de ces trois musiciens ? Et bien vous avez tord. Parce que personnellement je vais faire un effort tout de suite là et maintenant pour dénicher et écouter tout les groupes et projets auxquels ces trois types participent par ailleurs. Je vais peut-être être déçu mais j’ai confiance. Tout ça parce que Hippie Diktat a été une claque énorme en concert. Un mélange de noise-rock et de freeture d’une puissance incroyable et surtout d’une ampleur volumétrique qui vous écrase à chaque instant. Lorsque le groupe ralentit la cadence le phénomène d’écrasement est encore plus palpable, oui on n’est pas loin d’un jazz metal en version sale et grésillante et dans ces moments là je perds un peu le contrôle de moi-même. OK, je ne suis pas le seul et Hippie Diktat – le meilleur groupe avec lequel Cheverny a joué durant sa tournée triomphale du printemps 2013, me dira-t-on un peu plus tard dans la soirée – électrise le public entassé au Périscope. Révélation.

hippie diktat @ indie rock mag

Un bling, un groink et un tchak, il n’en faut pas plus à Hippie Diktat pour dessiner un agrégat jazz/metal/noise certes furieux mais d’une grande finesse. Après le chouette éponyme autoproduit de 2012, place à Black Peplum qui, comme son nom l’indique, voit le trio faire les choses en grand.

Ils sont trois mais sont capables de sonner comme quinze. Pourtant, l’ensemble reste paradoxalement très aéré. Réunion du saxophone baryton, touche-à-tout mais néanmoins plombé d’Antoine Viard (PipelineThe A.A’s ou encore Tristanol, liste non exhaustive) acoquiné à la batterie finaude de Julien Chamla (We Are All AmericansHelved RümFélineMOBILEINSEL MUSIK entre autres, sans oublier ses travaux solo), sous l’égide de la guitare enragée de Richard Comte (Heretic Chaos, un nombre impressionnant de collaborations mais aussi responsable d’un album solitaire, Innermap dont je ne saurais trop vous conseiller l’écoute), Hippie Diktat fait naître un sacré bordel à la sortie des enceintes. Le trio atomique dynamite son jazz déjà bien disloqué à grands coups de noise furibarde et balance des pincées de metal par-dessus pour rigidifier le tout. Et justement, force est de constater que le tout tient fièrement debout, bien campé sur ses fondations quoi qu’il arrive. « Hippie Diktat’s music is radical, raw and powerful » avance le trio, on ne saurait mieux dire. Nouvelle sortie du prolifique BeCoq après l’excellent Kindergarten de Louis Minus XVI, on tient là un disque qui est du même bois. Le même niveau d’excellence, la même expertise, les mêmes intentions sans doute aussi, que l’on pourrait parfaitement résumer par la laconique formule des Dead Neanderthals : « FUCK conventions and FUCK expectations ». En effet, la belle corolle de paon verte et bleue qui orne la pochette ne laisse en rien présager ce qu’elle cache. Un truc nucléaire qui balance de belles rasades retorses alternant avec des moments plus apaisés, très lents et rampants. Ils permettent au cortex de recouvrer son souffle quand le groupe empoigne l’auditeur partout ailleurs sans chichis en apposant simplement ses doigts autour de son cou. En relâchant ainsi son étreinte de temps en temps, la sidération ne s’effrite pas. Pourtant Black Peplum n’est pas foncièrement long mais s’il fallait recevoir ses déflagrations tout de go et sans pause, son intensité s’en trouverait forcément ternie. Et puis, loin d’être un groupe bas du front et sans nuances, Hippie Diktat préfère de toute façon privilégier l’exploration, le contre-pied et la rupture plutôt que se contenter de n’être que monochrome. Sans doute est-ce là aussi le sens de sa pochette multicolore à bien y regarder.

Cinq titres où la sauvagerie le dispute au silence, où le trio montre qu’il peut faire très mal mais aussi rentrer à l’intérieur de lui-même et se taire simplement. Quoi qu’il en soit, cette demi-heure passe bien trop vite et à peine les onze minutes et quelques du très impressionnant et bien nommé Angoisse viennent-elles d’agoniser que l’on sent poindre l’envie d’en entendre beaucoup plus. On se rabat donc sur le disque et on repart bien vite dans les circonvolutions plombées et urgentes de Black Peplum qui montre la batterie se reconfigurer sans cesse au gré des attaques de la guitare contre les lignes massives du saxophone. On a connu plus pacifique comme entame mais aussi moins saisissant. Et qu’Hippie Diktat balance ses tripes sans attendre dès le premier titre fait naître une furieuse envie d’explorer la suite. Ça tombe bien, E. Peacock voit le groupe tutoyer Noxagt ou Monno en densité sous l’effet d’une guitare proprement tellurique qui élabore un mur du son robuste que les coups de boutoir du baryton ont bien du mal à lézarder. Le climax est légèrement rompu sur un Deaf Can Dance durant lequel la guitare se tait pour laisser le saxophone et la batterie dialoguer tranquilles quelques instants. Sans doute le titre le plus rampant de Black Peplum. Le plus « jazz » aussi. Il reste cependant tout aussi accaparant que les autres. Full HD poursuit cette voie et montre à quel point le trio se fout des étiquettes. Quelques breaks typiquement metal l’ornementent (et cette fois-ci, c’est à Zu que l’on pense) que l’on retrouve très vite sur Angoisse. Le sommet. Disloqué, haché menu, doté d’une lourdeur extrême mais également très aéré, Hippie Diktat montre ici l’éventail de ses armes et se livre sans retenue. Les tympans en prennent plein la gueule mais pas que, le silence gagne du terrain peu à peu et finit par l’emporter. Un truc que l’on rêve de croiser en live pour voir comment le groupe restituera sa structure complexe et proprement métamorphe. Toutefois, on voit bien à quel point le trio s’accommode du studio, l’enregistrement de Richard Comte himself, tout à la fois naturel et détaillé, donne tout son poids à une mixture qui n’en manque déjà pas et lui permet d’habiter pleinement l’espace.

« Sale est son poil, généreux toujours... le hippie rit/Volontés atrophiées, vivre l’urgence... le hippie peste/Énergie décadente, masse sonore sauvage... le hippie chie/AMOUR » peut-on lire ici ou  et bien que Black Peplum mette en avant le côté hirsute de la formation, elle fait preuve par ailleurs d’une telle générosité, d’une telle débauche proprement offerte que même rigide et furibarde, elle n’en reste pas moins, c’est vrai, foncièrement hippie (enfin, en tout cas la version Flower Power qui ne s’était pas encore vendue au Grand Capital). Quoi qu’il en soit, voilà encore une sacrée perle à porter au crédit de Coax, de BeCoq et en règle générale d’une scène jazz/noise/metal/expérimentale locale et souvent triangulaire en pleine expansion (Louis Minus XVIKouma et tant d’autres). De la fureur, du bruit, de la tension et de l’apaisement, au final beaucoup de liberté et de souffle contenus dans des morceaux dynamiques qui empruntent ici et là pour construire un ailleurs saisissant.

Brillant.